Auvergne AVS

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dossier du mois de juin 2010 : l'autisme

L’AUTISME

"L'important n'est pas de vivre comme les autres, mais parmi les autres."

Daniel Tammet

 

 

 

"La pire maltraitance que l'on peut faire à une personne autiste est de ne pas l'éduquer et de la laisser croupir dans son autisme"

Stanislas Tomkiewicz

 

 

"Il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé"


Albert Einstein

 


"Beaucoup d'auteurs ont exprimé leur point de vue qu'une compréhension de l'autisme élargirait la compréhension de la nature humaine."

Bergue

I/ DEFINITION 


L’autisme est une pathologie due à une anomalie du développement neurologique pendant la période de maturation du cerveau.

Ce syndrome, qui appartient à la famille des troubles envahissants du développement (classification de l’OMS 1993), apparaît au début de la vie et touche au minimum 1 personne sur 1000 dans une proportion de 4 garçons pour 1 fille. Si l’on considère l’ensemble des troubles apparentés, certaines recherches vont jusqu’à 6 cas sur 1000.

La sévérité et la forme des troubles varie grandement d’une personne à l’autre. Cette atteinte, qui dure toute la vie, peut être associée à d’autres handicaps : déficience intellectuelle, troubles sensoriels ou moteurs, maladies génétiques, épilepsie etc.

Les personnes autistes présentent donc, sous des aspects différents, des difficultés dans certains domaines, en particulier pour :

- Développer une communication efficace et les moyens de cette communication

- Apprendre à décrypter les rapports sociaux et acquérir les outils pour s’y intégrer

Elles ont aussi une perception très spécifique du monde qui les entoure. Leur indifférence à l’égard des autres n’est qu’apparente : elle résulte en réalité de leur grande difficulté à comprendre les interactions sociales et à s’y conformer, d’où aussi peut-être le besoin de s’accrocher à des schémas répétitifs et donc rassurants.

 

II/ LES CAUSES

Contrairement à des hypothèses erronées ayant longtemps eu cours, l’autisme n’est pas dû à un dysfonctionnement de la relation entre la mère et l’enfant.

Hélas, cette hypothèse, née de l’approche psychanalytique de l’autisme, est souvent encore considérée en France comme partiellement valide, et continue de donner lieu à des prises en charge inadaptées et néfastes, notamment dans les hôpitaux de jour. Les causes précises à l’origine de l’autisme n’ont pas encore été entièrement révélées ; elles sont sans doute multiples, mais la communauté scientifique considère maintenant l’autisme comme le plus génétique des troubles neuropsychiatriques. Les recherches éclairent de plus en plus cet aspect avec lequel peuvent interagir divers facteurs environnementaux d’ordre physiologique (infections, produits toxiques etc.) et qui affecte le cerveau tant dans son développement que dans son fonctionnement.

En France

Actuellement, les personnes autistes sont presque systématiquement dans l’incapacité de s’insérer socialement et professionnellement puisqu’elles n’ont pas librement accès à une prise en charge adaptée à leurs problèmes.

En raison du nombre très limité de structures adaptées, et de l’approche souvent dispersée et sans cohérence des problèmes liés à l’autisme, les personnes autistes se retrouvent souvent à la charge de leurs parents, ou internés de façon définitive en hôpital psychiatrique. D’autres solutions sont pourtant possibles.

Les solutions

Il est indispensable que les familles puissent avoir accès facilement à un diagnostic précoce et posé selon les critères reconnus par la communauté scientifique internationale.

Des études ont montré qu’une intervention précoce et bien ciblée pouvait largement réduire le handicap et favoriser le développement de l’enfant. La capacité d’apprendre étant différente, c’est sur ce point précis que la prise en charge doit se concentrer.

Il existe des approches qui bénéficient de suffisamment de recul et qui ont abouti à des résultats tangibles :

-Développement de la communication et des interactions

-Réduction de la dépendance et des troubles du comportement

-Insertion scolaire et sociale…

Les méthodes éducatives globales structurées et adaptées à l’enfant, à l’adolescent ou à l’adulte autiste permettent une véritable possibilité d’évolution. Chaque personne autiste doit pouvoir bénéficier, à tout âge, d’un « projet de vie » personnalisé.

Le manque d’informations sur les moyens de venir en aide aux personnes autistes, entraîne les familles à se tourner vers les associations de parents. Les familles y trouvent un réel soutien, même si les associations ont elles mêmes bien souvent du mal à se faire entendre des pouvoirs publics.

 

 

 III/ LE SYNDROME D’ASPERGER 

Le SA est un trouble envahissant du développement qui fait partie de l’extrémité «haute » du continuum autistique. 

Le SA n'est pas une maladie mentale d'origine psychologique : c'est un trouble du développement neurologique d'origine génétique.

Les principales perturbations des sujets atteints touchent la vie sociale, la compréhension et la communication. Ces troubles sont la conséquence d’une anomalie de fonctionnement des centres cérébraux dont la fonction est de rassembler les informations de l’environnement, de les décoder et de réagir de façon adaptée. Le sens des mots, la compréhension et la communication sont affectés. Le sujet ne parvient pas à décoder les messages qui lui arrivent (il paraît submergé par la «cacophonie » de l’environnement), ni à adresser clairement ses propres messages à ceux qui l’entourent. 
Il est dispersé dans l’espace, déphasé dans le temps, dépassé par les échanges, et sa communication maladroite et hésitante se perd le plus souvent dans des tentatives avortées.
Pour être moins dispersé, il se concentre sur les détails ; pour être moins déphasé, il se complaît dans les routines ; ses échecs de communication avec les autres l’amènent à une concentration exclusive sur lui-même, sans pour autant le satisfaire (d’après G. LELORD).

Les atteintes peuvent être plus ou moins sévères selon les personnes.

Les patients atteints du syndrome d’Asperger sont étonnants de par leur culture générale et leur intérêt dans un domaine spécifique dans lequel ils excellent.
Le vrai problème : leurs difficultés d’intégration au sein de notre société.
Leurs troubles du comportement par leurs rites, leur résistance au changement et leurs angoisses qui peuvent en découler, leur préoccupation circonscrite à un ou plusieurs centres d’intérêts, leur langage le plus souvent recherché et riche en vocabulaire, leur mémoire … Tout ceci déconcerte !

IV/ HISTORIQUE


C’est un médecin autrichien, le Dr Hans ASPERGER, qui décrivit en 1943 (publication en 1944) des troubles du comportement chez plusieurs enfants qui avaient un développement normal de l’intelligence et du langage, mais qui présentaient des comportements proches de l’autisme et une déficience marquée dans les interactions sociales et la communication. Il appela ce trouble «autistichen Psychopathen ».

En 1944, en Autriche, on exterminait les handicapés mentaux. Il insiste pour dire qu’ils sont éducables, et, dans les années 1960, qu’il est nécessaire de faire faire des apprentissages à ces autistes «purs ». Hans ASPERGER surnommait ses patients «les petits professeurs ». 

En 1981, une psychiatre anglaise, Lorna WING, va réactualiser le travail de 1944 en publiant un compte-rendu, des travaux réalisés et une proposition pour définir un «syndrome d’Asperger », à partir de la description de 34 cas. En 1991 Uta FRITH fait une traduction en anglais.

Les personnes atteintes du SA ne peuvent pas guérir, mais des stratégies éducatives et comportementales peuvent être développées pour les aider à comprendre.
Les règles sociales (comportement à table, à l’école), les jeux de rôle sont une «clé ».
Il faut élargir leur territoire.


De nos jours, il est primordial que nos enfants puissent évoluer en milieu ordinaire compte tenu de leur potentiel.
Durant leur scolarité la présence d’une auxiliaire de vie scolaire est souvent nécessaire et bénéfique.
A l’âge adulte pour les aider à s’intégrer au mieux au sein de notre société, un accompagnement par un référent est essentiel toute leur vie. 
Celui-ci peut les guider vers l’autonomie par des apprentissages et avoir un rôle de superviseur.

Il est donc important que le diagnostic (établi selon les critères internationaux) soit posé le plus tôt possible, afin que ces personnes puissent bénéficier d'une prise en charge éducative adaptée. Trop souvent de nos jours, les parents passent pour des personnes éduquant mal leur enfant et cela ne fait que retarder le diagnostic.

Ces personnes dites "bizarres", atteintes du syndrome d’Asperger, peuvent et doivent avoir une existence "normale".


V/ DANS LE DOMAINE SCOLAIRE

http://www.participate-autisme.be/go/fr/videos.cfm?videos_id=52&videos_section=2 

STIMULI  SENSORIEL

Des difficultés de traitement des informations sensorielles sont souvent présentes dans l’autisme. Elles peuvent présenter pour l’enfant, une gêne ou un intérêt plus ou moins

envahissant. L’aménagement de l’environnement peut réduire ces difficultés.

 

- Sensibilité aux stimuli visuels +

 

Reflets, rayons de lumière, scintillements des néons, éteindre et rallumer la lumière, lignes, écriture, objets…

 

 

- Sensibilité auditive +

 

Voix humaines, sons, grésillement d’un néon, objets qui tombent, moteurs de véhicules, avions, tondeuses…

 

- Sensibilité à la douleur +

 

Hypo ou hypersensibilité, un enfant peut se laver les mains sous une eau très chaude sans réagir ou au contraire pour un autre, un simple effleurement de la peau peut être ressenti douloureusement…

 

ACTIVITES ET INTERETS

Les enfants atteints d’autisme ont souvent des activités répétitives et des intérêts particuliers.

Ces intérêts sont plus ou moins envahissants pour la personne et son entourage :

 

• Objets divers et parfois insolites.

• Manipulation inhabituelle des objets.

• Attachement à certains détails.

• Alignements d’objets.

• Tournoiements, gestes, mouvements, déplacements répétitifs.

• Eteindre et rallumer les lumières, ouvrir, fermer les portes.

• Ecrire, lire, compter, boire.

• Rechercher des effets visuels.

• Sentir des odeurs.

• Ascenseurs. Dinosaures. Stores. Mythologie grecque. Géographie. Histoire. Informatique… 

 

SOCIALISATION

Les enfants atteints d’autisme ont des problèmes pour comprendre et suivre les règles de la vie sociale, pour comprendre ce que les autres pensent. Ils ne le font pas exprès. Ces problèmes sont

plus ou moins contraignants pour la personne. Un découragement peut être observé.

 

• Incompréhension de l’implicite du langage. Incompréhension des codes sociaux.

• Distance inappropriée. « Trop proche ou trop distant ».

• Indifférenciation des personnes.

• Visage peu expressif.

• Peu ou pas de réciprocité.

• Evitement du regard. Evitement du contact physique.

• Isolement extrême de l’enfant qui semble indifférent à l’entourage.

• Comportements qui paraissent étranges, inappropriés au contexte.

• Manque d’inhibition en société par manque de compréhension des codes sociaux…

 

COMMUNICATION

Les enfants atteints d’autisme ont des problèmes pour communiquer, ce n’est pas de leur faute.

Ces problèmes sont plus ou moins handicapants pour la personne :

 

• Vocabulaire riche, langage « précieux », néologismes. « Invention de mots ».

• Jargon, écholalie immédiate ou différée, rituels verbaux.

• Inversion pronominale. « Tu pour je ».

• Voix mécanique, chuchotée, prosodie particulière, cris.

• Manque de réciprocité de la conversation.

• Absence d’attention conjointe.

• Utilisation de la main ou du corps de l’autre comme un outil.

• Communication non verbale, imitation, gestes, stéréotypies.

• Comportements appropriés ou inappropriés pour obtenir un objet ou éviter une situation…

 

CONCLUSION

 

L'autisme est encore pour nombre de chercheurs, une terre inconnue.

Les connaissances scientifiques dans ce domaine restent fragiles, malgré le travail effectué sur les plans de la recherche médicale, psychologique, pharmacologique...

 

L'intérêt pour la société n'est pas de donner une réponse purement médicale aux origines de la maladie, mais surtout de nous aider à mieux comprendre les relations humaines, notamment par les témoignages de personnes autistes qui doivent servir de point d'appui pour la réflexion dans les interactions sociales et l'égocentrisme qui fait naitre tant de préjugés.

 

 

 

SOURCES :

 

http://www.crdp-aix-marseille.fr

 

http://patrickchambres.blogspot.com/

 

http://www.lemonde.fr/societe/article/2010/04/02/de-la-difficulte-de-scolarisation-des-enfants-autistes_1328183_3224.html

 

 

 

 

 

 

 

 

 
   

 

 

Dans la presse…

 


Articles parus dans Le Monde…

Témoignages sur la science, la scolarisation et l’autisme.       


La France et l'autisme


par Monica Zilbovicius, psychiatre directeur recherhe INSERM

02.03.10

Pendant mon adolescence j'ai souvent lu les lettres de mon père publiées dans la presse quotidienne. J'avais beaucoup de mal à comprendre son geste et son besoin de crier publiquement ses colères. Et me voila quelques décennies plus tard faisant ce même geste. Il était poète, et criait avec sa plume. Moi scientifique, je crie aves les touches de mon ordinateur. Ecrire pour dénoncer, pour sortir du silence et pour ne pas consentir. La recherche scientifique sur les mécanismes cérébraux impliqués dans l'autisme fait parti de ma vie depuis plus de 20 ans. En tant que psychiatre et scientifique je suis témoin et acteur d'une longue bataille pour que les personnes avec autisme soient vues avec un regard nouveau en France. Loin des querelles d'école et plus près de la réalité internationale.

Le plan autisme lancée par le gouvernement en 2004 a ouvert un grand chantier, mais les veilles idées ont la vie longue. Dans une perspective de changement, un groupe d’experts dont je fais parti a été sollicité en 2009 à participer à la construction d'un socle de connaissance sur l'autisme, à savoir, la rédaction d'un document contenant les notions modernes sur l'autisme, concernant la définition de ce syndrome et les stratégies diagnostiques. Il n'était pas question de faire le point sur les avancées scientifiques, mais de construire un instrument de base pour la formation et l’information des personnes travaillant dans ce domaine de santé. Cette mission à été confiée par le Ministère de la Santé à la Haute Autorité de Santé (HAS), suivant un protocole classique dans la constitution de tels documents. Une année de long travail ce suit. Toute information retenue doit obéir aux règles d’un processus consensuel (il n'est pas question ici de vote majoritaire). Les phrases sont débattues à la virgule près… et en fin d'année 2009 le débat est clos.

Les informations contenues dans le projet de ce document, qui par ailleurs sont pour la plupart disponibles sur un simple clic en internet, donnent une vision réaliste de l'autisme en résonance avec celle de la communauté internationale et sont loin d'être révolutionnaires. La seule "révolution" a été de constituer un document actuel, qui mettait la France en phase avec le reste du monde en matière d'autisme. Douce illusion.

Des forces "occultes", mais bien présentes, ont réussi à modifier le contenu du document et à redonner au problème de l'autisme le même vieux visage, qui apparemment plait à tant des professionnels français. C'est comme si dans le domaine du Cancer, la France décidait de faire "bande à part" du reste de la communauté internationale avec de définitions et des propositions thérapeutiques vieilles de plusieurs décennies. Un vrai scandale. Mais la psychiatrie de l'enfant en France, et l'autisme en particulier, sont encore un sujet de débat idéologique où la vision scientifique de ce problème majeur de santé de publique (plus de 1 enfant sur 1000 sont concernés) n'a pas sont mot à dire.

Et pourtant en matière le recherche scientifique un vrai paradoxe français s'opère. Les derniers communiqués de presse en sont témoins (AFP du 15 févr. 2010 "Une hormone améliore les contacts sociaux d'autistes selon une étude"). Avec les espoirs réels des nouvelles thérapeutiques à revoir… Mais apparemment on préfère encore les vieux draps glacés ! Les parents et leurs associations ne sont pas dupes et leur combat continue. A nous professionnels de sortir de notre silence ! (le monde 02.03.10)

A l'occasion de la Journée mondiale de l'autisme, le 2 avril, deux députés UMP ont déposé, jeudi 1er avril, une proposition de loi visant à faire de l'autisme une grande cause nationale en 2011, notamment pour permettre de "développer l'accompagnement des enfants autistes, et favoriser leur intégration et leur maintien en milieu scolaire ordinaire".

 

Selon Marcel Hérault, président de la fédération Sésame autisme et au vu des témoignages des parents d'enfants autistes recueillis par Le Monde.fr, la marge de progression est énorme. Et les perspectives de restriction budgétaire au sein de l'éducation nationale ne donnent pas matière à espérer.

Comme beaucoup de handicaps, l'autisme peut se présenter sous de multiples formes, et le problème de la scolarisation se pose surtout pour les enfants les plus gravement atteints, avec une déficience intellectuelle. L'éducation nationale a envers eux – comme envers tous les enfants – une obligation de scolarisation, qui passe en général par l'accueil de ces enfants en classe d'intégration scolaire (CLIS).

Mais, le plus souvent, explique Marcel Hérault, "les enfants sont scolarisés seulement une demi-journée ou une journée par semaine". Certains enfants bénéficient de service d'éducation spécialisée et de soins à domicile (Sessad) ou se rendent dans un institut médico-éducatif (IME), mais, leur nombre est insuffisant et la majorité du temps, les parents doivent s'occuper seuls de leurs enfants.


DES PARENTS ESSEULÉS

Dans un témoignage au Monde.fr, Christian, père célibataire d'un enfant autiste, raconte que "les principales difficultés rencontrées concernent sa garde une fois de retour de l'IME". "Les horaires sont difficilement conciliables avec mes propres horaires professionnels, ce qui génère un frein dans ma progression, mon épanouissement professionnel, d'autant plus que je m'occupe seul de mon fils", raconte-t-il.

A bout, certains parents vont jusqu'au procès contre l'éducation nationale pour défaut de scolarisation. "Ils les gagnent, raconte M. Hérault, et, en général, ils reçoivent une petite indemnisation, et l'Etat met alors à leur disposition des auxiliaires de vie scolaire, mais pendant quelques mois seulement." Restent les hôpitaux de jour pour les enfants les plus atteints, mais la qualité de leur prise en charge et de leur éducation varie d'un hôpital à l'autre.

Par ailleurs, selon les formes d'autisme, la scolarisation en classe ordinaire n'est pas toujours le meilleur pour l'enfant. Quand les enfants sont scolarisés dans des classes ordinaires (par faute de place dans les CLIS), outre le rejet des autres élèves, ils souffrent du manque de formation des professeurs. "Ces enfants peuvent avoir du mal à rester assis en classe, être hyperactifs, manquer de concentration ou ne pas comprendre ce qu'on leur demande. Au final, l'enfant se retrouve souvent seul, abandonné au fond de la classe", déplore Marcel Hérault.


DES PROFESSEURS PEU OU PAS FORMÉS

"Un enfant autiste diagnostiqué est pris pour un enfant 'bizarre', coléreux, capricieux, malpoli, idiot, naïf... puisque son cerveau a un fonctionnement légèrement différent, raconte Marianne, maman d'une fille autiste. Un enfant autiste-Asperger dit tout ce qu'il pense, n'a pas de sens social, prend chaque mot au premier degré, ne supporte pas qu'on le touche, ne supporte pas le bruit... Bref, l'école est un enfer, un stress permanent pour ces enfants."

Le fils de Véronique, âgé de 4 ans et demi, est aussi victime du manque de formation en milieu scolaire. Pourtant, explique-t-elle, "cette prise en charge est très importante pour ces enfants. Nous avons remarqué une évolution fulgurante d'Arthur depuis qu'il est scolarisé. Nous attendons de l'éducation nationale qu'elle forme le personnel scolaire, qu'elle rétablisse le nombre d'agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) dans les classes de maternelle pour qu'enfin nos enfants puissent manger à la cantine, et qu'elle augmente les sections de CLIS pour autistes".

La scolarisation en maternelle est déjà difficile, mais la suite l'est encore plus. "A chaque étape de la scolarisation, explique M. Hérault, le nombre d'enfants autistes scolarisés chute. A l'arrivée au collège, il y a un réel goulet d'étranglement. Les unités pédagogiques d'intégration (UPI) restent trop peu nombreuses." 

 

"L'ÉDUCATION NATIONALE EST UNE FORTERESSE"

Abla, mère d'un garçon qui aura bientôt 16 ans, explique que son enfant a été scolarisé en CLIS puis en UPI. "Il va être déscolarisé, car aucune suite logique n'est prévue pour les autistes d'un niveau intermédiaire", s'inquiète-t-elle. "Soit on lui propose des formations pour être manutentionnaire, balayeur de feuilles mortes ou menuisier, soit il sort du système scolaire et vogue la galère !", raconte cette "maman fatiguée et très en colère". "Pour les jeunes autistes qui, comme mon fils, n'ont pas un niveau académique suffisant pour entrer dans une seconde générale ou technologique, mais qui n'ont aucun goût pour des emplois strictement manuels, l'éducation nationale ne prévoit rien et s'en lave les mains proprement", estime-t-elle.

"L'éducation nationale ne peut pas à la fois réduire son budget et prendre en charge les enfants autistes, poursuit M. Hérault. On ne peut pas attendre un meilleur accueil des enfants handicapés alors que des classes sont supprimées. L'accueil des enfants autistes demande un coût."

La solution est, selon lui, que l'éducation nationale reconnaisse qu'elle ne peut pas tout prendre en charge. "Il faut une convention entre les IME, les Sessad et l'éducation nationale pour mettre en place un système souple, avec une institution propre, détachée de l'éducation nationale", juge-t-il, avant d'ajouter que "l'éducation nationale est une forteresse qui s'imagine qu'elle peut régler les problèmes toute seule".

C'est justement ce que Jean, père d'une petite fille autiste, dénonce. Sa fille de 6 ans est suivie par un psychologue "cognitiviste". "Le bénéfice qu'elle en retire est évident, dit-il. Mais impossible pour le psy d'entrer à l'école, car il n'y a pas d'autorisation ou de convention signée avec le rectorat. Nous demandons simplement à l'éducation nationale de s'informer de ce qui se fait ailleurs (aux Etats-Unis ou au Canada, par exemple) et d'être plus à l'écoute des parents."

Alba, la "maman en colère", explique se battre "contre un mammouth transfuge de la préhistoire". "Et moi, ajoute-t-elle, mère d'un jeune autiste qui veut continuer à apprendre l'histoire de France, la forme narrative d'une phrase et comment résoudre des équations, dans une classe remplie de camarades. Moi, j'espère bien avoir sa peau à ce mammouth !"


Hélène Bekmezian


Autisme : anomalie de la réponse cérébrale à la perception de la voix

Une étude menée au sein de l'équipe mixte Inserm-CEA « Imagerie Cérébrale en Psychiatrie » au Service Hospitalier Frédéric Joliot (en collaboration avec le Centre de Recherche en Neuropsychologie et Cognition (CERNEC) et l'Université de Montréal) révèle une incapacité des autistes à activer les aires cérébrales spécifiques de la reconnaissance de la voix humaine. Ces résultats étayent l'hypothèse selon laquelle les difficultés des autistes seraient liées à un déficit de la perception des stimuli sociaux. Le détail de cette étude est publié dans le numéro d'août de la revue Nature Neuroscience.


La voix humaine est riche en informations verbales mais aussi non-verbales : elle constitue un véritable "visage auditif" que nous savons interpréter. Nos capacités à percevoir ces informations vocales jouent un rôle crucial dans nos interactions sociales. De plus, une équipe de chercheurs a mis en évidence, par l'imagerie cérébrale fonctionnelle, que la perception vocale implique des régions corticales spécifiques appelées "aires de la voix", situées chez la plupart des individus le long du sillon temporal supérieur.

L'autisme est une pathologie sévère du développement de l'enfant qui se caractérise par des difficultés dans les interactions sociales. Des études comportementales ont permis d'observer également un déficit dans la perception de la voix humaine. Afin de préciser les bases cérébrales de cette pathologie, les chercheurs de l'équipe mixte Inserm-Cea ont étudié par imagerie fonctionnelle (IRM fonctionnelle) comment le cerveau des sujets autistes adultes perçoit la voix humaine par rapport à d'autres sons. Pour cela, l'activité cérébrale de cinq adultes atteints d'autisme et de huit volontaires sains a été enregistrée alors qu'ils écoutaient des séquences de sons alternant la voix humaine (parole, cri, rire, pleur, chant) et d'autres types de sons non vocaux (animaux, cloches, instruments de musique, voitures etc…).

Les résultats obtenus révèlent chez les autistes une absence d'activation de l'aire spécifique de la perception de la voix ("aire de la voix"). Chez ces sujets, les aires cérébrales activées sont exactement les mêmes, qu'il s'agisse de voix humaines ou de sons non vocaux. Aucune activation cérébrale spécifique d'une reconnaissance de la voix humaine n'a pu être mise en évidence. Par ailleurs, à la question « qu'avez-vous entendu pendant l'examen ? », les autistes ne rapportent que 8,5% de sons vocaux contre 51,2% pour les témoins, confirmant leur faible capacité à reconnaître des voix humaines.

De précédentes études dans le domaine visuel en IRM fonctionnelle avaient déjà révélé chez les autistes une absence d'activation de l'aire spécialisée dans le traitement des visages. Cette étude sur la voix, stimulus auditif riche en informations sur l'identité et l'état émotionnel de l'interlocuteur, met cette fois en évidence un trouble de la perception sociale dans le domaine auditif.

Ces anomalies du traitement de la voix et des visages suggèrent que les difficultés des autistes à comprendre l'état émotionnel d'autrui et à interagir avec lui pourraient être liées à un déficit de la perception des stimuli sociaux. Ces résultats en imagerie fonctionnelle apportent de nouvelles perspectives pour comprendre les perturbations des interactions sociales dans l'autisme. Enfin, la mise en évidence de ces déficits perceptifs pourrait permettre l'élaboration de stratégies de rééducation visant à induire un traitement spécifique des informations vocales et faciales, traitement qui semble ne pas s'être développé spontanément chez l'autiste.



13/06/2010
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